NICHOLLE KOBI – La femme porte le monde en elle
Nicholle Kobi est originaire du Congo Kinshasa. Elle a passé son enfance en Normandie puis Paris après le lycée. Elle a étudié l’histoire de l’Art. Aujourd’hui, elle vit à New York et son rêve de créer des studios dans le monde demeure plus vivant que jamais.
Comment vivez-vous votre réalité d’illustratrice installée désormais à New York ?
New York est une ville pleine d’énergie, inspirante. Rien ne change vraiment de Paris en ce qui concerne mon travail. Sauf peut-être qu’à New York on a envie de rêver plus grand car il y a des opportunités à chaque coin et recoin. Les gens sont très enthousiastes. Il faut aimer faire du networking ce que j’aime pas.
Quelles sont vos perspectives d’avenir en créant Nicholle Kobi Studios?
J’espère en faire une chaîne internationale basée sur tous les continents je sais je vois grand. Je ne sais pas faire autrement.
D’où vient la force créatrice d’une illustratrice comme vous?
Ma force vient de l’idée que beaucoup aiment détruire l‘image de la femme noire, moi je ne suis pas pour la redorer. Je suis pour qu’elle ne soit plus invisible dans nos sociétés et aussi pour casser ces clichés péjoratifs qu’on lui a collés.
La femme noire est présente à tous les niveaux de la société : présidente, aviatrice, prix Nobel, des fois on a l’impression qu’on ne voit que la pauvre femme dans les champs, les maternités, les marchés : Qu’en pensez-vous?
Je pense que les Africains malheureusement se voient à travers les yeux des Européens. Les femmes noires n’ont jamais été un sexe faible. Bien au contraire. Elles ont le rôle central dans les communautés noires. La femme noire est une entrepreneure par exemple elle dirige sa petite ou grande entreprise, elle va aux champs ou au bureau et elles ne baissent que rarement les bras. Sans oublier qu’elles ont souvent une famille à gérer, des enfants à élever et une maison à tenir debout. Elles sont déterminées, elles sont une force de la nature. On veut absolument les occidentaliser alors qu’elles ont leurs propres valeurs. La femme noire doit se faire confiance car la société dans laquelle elle vit a peur de sa force.
La femme des campagnes sera-t-elle peinte un jour?
Qu’est-ce que c’est une femme des campagnes? J’ai été en Afrique je n’ai pas vu la différence entre une femme en ville et une femme dans son champ ou au marché. Si vous voulez dire une femme avec un foulard sur la tête, pieds nus comme l’image que les occidentaux aiment montrer je ne suis pas là pour ça. J’ai été dans les deux Congo, au Zimbabwe en Afrique du Sud et je n’ai vu que des femmes comme celles que je dessine. Bien sûr d’autres sont en tenue traditionnelle mais je ne dessine pas ce que je maîtrise pas.
Pensez-vous que le monde peut vivre sans femme?
Comment le monde peut-il survivre sans femme quand on sait d’où vient le monde? La femme porte le monde en elle.
Seriez-vous prête à illustrer des livres pour la jeunesse?
Pourquoi pas même si ce n’est pas mon domaine de prédilection
Comment nait une image dans votre imaginaire?
Je ne saurai vous l’expliquer.
Le dessin, une passion vécue depuis l’enfance ou un choix de vie?
C’est héréditaire chez nous, les femmes de ma famille sont toute des artistes. C’est depuis l’enfance.
Et si des jeunes filles venaient vous dire : Apprenez-nous à dessiner ?
Ça je ne sais pas faire. Dieu merci mes filles ont reçu ce don du dessin aussi, donc je n’ai pas eu cette demande de leur part. Elles ont appris d’elles-mêmes.
Pourquoi n’habillez-vous pas vos femmes avec des tissus africains comme le bogolan, kita ou raphia avec un chef à l’africaine pour une diversité effective?
Je dessine ce que je connais et ce que j’aime. J’ai fait quelques dessins en kente et en tissus traditionnels zulu et xhosa. J’aime beaucoup l’art xhosa et zulu.
Pensez-vous ouvrir des studios en Afrique, un jour ?
J’espère que oui, j’y travaille durement.
Propos recueillis par Marie-Léontine Tsibinda Bilombo