GUY LENOIR – Un texte, un acteur, un public…

Marie-Léontine Tsibinda Bilombo

GUY LENOIR – Un texte, un acteur, un public…

GUY LENOIR – Un texte, un acteur, un public.

Homme de théâtre, metteur en scène, Guy Lenoir a « rencontré » l’Afrique en 1982, au cours d’une tournée des capitales francophones avec une pièce de Samuel Beckett, « En attendant Godot ». À Abidjan, Lomé, et surtout Brazzaville, il y découvre une génération d’auteurs, d’écrivains et de dramaturges africains qui interrogent notre rapport au continent, modifiant ainsi notre sa perception, donnant à voir, à entendre une Afrique moderne et contemporaine, liée aux corps, à l’âme, aux sens résolument, humaine. Cette rencontre avec l’écriture africaine vécue comme une révélation sera la source de sa démarche artistique, le projet d’une vie.

Et l’idée vous est venue de créer MC2a – Migrations Culturelles aquitaine afriques…

Dans la foulée je créé une structure associative dédiée à l’Afrique, aux afriques : MC2a – Migrations Culturelles aquitaine afriques. J’y développe un projet artistique autour des migrations, dans une volonté de rompre le rapport Nord/Sud. Par son histoire et celle de l’Afrique, Bordeaux semble la ville idéale à un tel projet, port d’attache vers le continent. Un projet culturel mais aussi politique et sociétal.

            Comment aviez-vous attrapé le virus du domaine de la culture? 

Né dans une famille traditionnelle, j’ai eu une enfance heureuse, ouverte au monde. Bénéficiant d’une éducation attentive à la société, sensible à l’expression et au partage, je me suis engagé dans l’action culturelle dès l’adolescence.

Vous vivez à Bordeaux mais pendant plusieurs années vous aviez travaillé avec des hommes de culture du Congo Brazzaville : comment le contact a-t-il été établi?

Lors de mon premier séjour à Brazzaville en 1982 avec la compagnie théâtrale bordelaise Fartov et Belcher, Michel Janin directeur du CCF nous a fait connaître et rencontrer Sony Labou Tansi et sa compagnie le Rocado Zulu Théâtre. De cette rencontre est née mon implication avec le théâtre africain, puis plus tard aux arts du continent.

Mais un homme, en l’occurrence, Sony Labou Tansi vous a pratiquement fait aimer vos voyages culturels au Congo : pouvez-vous nous raconter la genèse de votre rencontre avec cet homme?

À son contact, les membres de notre compagnie et moi-même avons été, subjugués, séduits et admiratifs de sa personnalité, sa direction d’acteur.

Avec Sony, vous aviez travaillé ensemble, cela fait longtemps, mais vous souvenez-vous des pièces montées avec le Rocado Zulu Théâtre qu’il dirigeait?

Oui bien sûr, notamment « La peau cassée » en 1984, puis lors de ses venues régulières en France au Festival des francophonies et chez nous à Bordeaux: « Antoine m’a vendu son destin » «  Moi veuve de l’empire » et enfin en 1989 « La résurrection Rouge et Blanche de Roméo et Juliette » écrite à ma demande et réalisée par ma  compagnie, en partenariat avec le Rocado, dans le cadre du projet BBKB (Bordeaux-Bangui-Kinshasa-Brazzaville)

Quels ont été les défis rencontrés quand vous quittiez le confort de vos salles à Bordeaux pour vivre la vie pénible des artistes au Congo?

Faire du théâtre avec RIEN ou presque, retour aux fondamentaux chers à Jean Vilar fondateur du Théâtre National Populaire, père du grand festival d’Avignon et à sa devise: un texte, un acteur, un public.

Vous étiez allés dans des villes comme Madingou, Pointe-Noire, Boko, si mes souvenirs sont bons : quelles impressions gardiez-vous lors de ces passages? 

L’attrait des populations pour le théâtre de Sony et le Rocado était exceptionnel. Le public très nombreux, en manque d’action culturelle, bruyant d’enfants joyeux était là, en très, trop (?) grand nombre même, ce qui compliquait la tâche des artistes.

Vous sentiez-vous en phase avec les comédiens du Rocado, le travail vous semblait-il satisfaisant ?  

Totalement. Sony était très exigeant vis à vis des acteurs, il demandait discipline, efforts et disponibilité.

Qu’aviez-vous vécu de frappant lors de ses tournées artistiques? 

La joie de vivre et de créer ensemble, avec Sony.

Et courant 1990, vous aviez créé Bordeaux-Bangui-Kinshasa-Brazzaville- dans quel but? 

Sony m’avait convaincu que le fleuve Congo, voie navigable,  était la seule route qui reliait hommes, villes et villages au cœur de l’Afrique centrale, ainsi que les deux Congo (s) qui n’auraient jamais dû être séparés comme ils l’ont été en 1885 par la conférence de Berlin, et la colonisation qui s’en suivit.

Le rassemblement de ces acteurs francophones et autres personnes vous accompagnant dans ce voyage, pour porter la culture de Bordeaux à Bangui, Kinshasa et Brazzaville a-t-il donné satisfaction aux promoteurs de l’idée? 

Nous ne voulions pas « porter la culture » mais partager nos cultures. Dans ce sens , oui, la réussite fut au rendez-vous.

Combien d’artistes étiez-vous au total dans ce projet ? 

Une centaine, représentant treize pays du monde francophone, d’Afrique, d’Europe et d’Amérique.

Le BBKB, une grande expédition : avait-il produit des résultats au plan d’abord journaux et récits de voyage ensuite des créations artistiques suscitées (pièces de théâtres, archives photographiques, essai, nouvelle, roman, documentaires filmiques de création…) de la part de chacun des membres de l’expédition?

Le mot « expédition » fait référence aux premiers explorateurs occidentaux que furent Brazza et Stanley. Parlons plutôt de périple, d’aventure car s’en fût une, humaine d’abord, et artistique.

Ce projet réalisé sont nées d’autres aventures théâtrales, et bien sûr des écrits, articles, vidéos, bandes dessinées, photos….

Aujourd’hui, nous avons l’impression que le BBKB est resté muet sur ces résultats.

Oui parce que, par la nature même du projet, BBKB était éphémère, donc normalement il s’est dissout dans le temps, laissant les artistes et acteurs du projet à leurs propres souvenirs. .

Existe-t-il une banque d’informations et des données sur le fleuve, les villages et leurs habitants qu’on peut interroger et refaire vivre à posteriori?

Non mais elle pourrait être constituée par ceux qui en possèdent les éléments, notamment François Campana qui était le directeur du projet, et moi-même, initiateur avec Sony du BBKB.

Peut-on imaginer aujourd’hui une réédition du BBKB en tenant compte de l’expérience de la première édition?

Bien sûr et ce serait mon souhait, tant d’années après. Mais l’état de navigation dans les eaux du Congo et la sécurité sur le fleuve le permettraient-ils?

Quels sont les pièces présentées lors de cet événement? 

« Franco, l’âge de Dieu » par le Rocado, « La Résurrection Rouge et Blanche de Roméo et Juliette » de SLT, « Fragments d’une lettre d’adieu lus par des géologues » du canadien Norman Chaurette. Il y eut également du théâtre d’intervention, notamment autour de la sensibilisation au SIDA.

La Garonne et le Congo : un mariage culturel sans fin des eaux puissantes des deux fleuves? 

Absolument. Un an après, en 1991 nous avons marié à Blaye (33),  les eaux du Congo à celles de la Gironde (réunion des fleuves Garonne et  Dordogne). À cette occasion, Sony a versé dans l’estuaire de la Gironde les 5 litres du Congo transportés depuis Brazzaville!

Actuellement, vous vous occupez du projet culturel Migrations Culturelles aquitaines afriques, n’est-ce pas? Est-ce dans le même sens que le BBKB : unité dans la création et promotion culturelles et artistiques des artistes du monde? 

Oui, BBKB a été inspirant pour la suite de ma carrière artistique et fondateur de mes actions entre les artistes des afriques des ceux de mon environnement, tant local qu’international.

Guy Lenoir

Directeur artistique MC2a

Web2a.org

guylenoir33@sfr.fr

Propos recueillis par Marie-Léontine Tsibinda Bilombo

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