JORUS CONTEUR CONTRE JORUS MABIALA – Le conte a souvent pour but de raconter l’ancrage
Il se présente souvent en disant « Jorus Conteur » en fait, il s’appelle Jorus Mabiala pour l’identité civile. Il fait ses études primaires et secondaires à Brazzaville, au Congo. Toute sa formation artistique prend de l’ampleurau sein de la compagnie Monana au Centre Sony Labou Tansi de Brazzaville. Mais Jorus Mabiala fuit Brazzaville à cause de la guerre qui éclate en 97. Il se réfugie à Pointe-Noire où il rencontre Samuel Keller, au centre culturel français de la même ville. Un projet naît de leur rencontre et Jorus finira par poser ses valises à Marseille, dans les années 2000. Il faut sans doute préciser que Samuel Keller est le directeur de « L’atelier de l’Omnibus qui propose des expositions interactives image et son, associées à des spectacles de contes, à la recherche d’autres cultures ». Et depuis vingt ans, Jorus Mabiala devenu « Jorus Conteur » sillonne les rues, les villages et les départements de la vieille France et du monde.
De nombreuses personnes veulent devenir, avocat, médecin, architecte, mais vous avez choisi de devenir conteur : expliquez-nous cet engouement pour le conte.
Les prêtres, les pasteurs, les évangélistes, les avocats, les enseignants, les médecins, les militaires et les gendarmes, sont la majorité des personnes qu’on rencontre dans nos vies et surtout avec la philosophie de nos contrées, ils représentent la réussite humaine. Une fois tout ce monde-là cité, dans une famille, on peut parler de ceux qui font des choses qui les dépassent. Qu’ils ne peuvent pas contrôler. L’artiste fait son apparition. Etre artiste c’est quelque chose qui ne peut pas s’expliquer ni se revendiquer.
Le conte peut donc nous sortir des chemins rocailleux de la vie : quel message envoyez-vous à vos publics?
Le conte comme le conteur est un canevas qui met souvent l’Homme en face de lui-même. Au- delà du merveilleux, la vie de tous les jours et son ressenti est véhiculé par le conte. De nos jours où l’Homme se méfie de sa conscience, le conte a souvent pour but de raconter l’ancrage.
Et vos publics sont variés : comment les contes du Congo peuvent embraser l’Europe, l’Afrique car vous voyagez beaucoup en tant que conteur!
Le conte comme l’art du conteur est d’abord une performance artistique sur ses dires, il est par essence universel. Mais on dit très souvent que celui qui n’a pas d’ancêtre n’a pas de parole. Donc quand tu n’as pas de parole prend source dans ton vécu et dans ton rêve d’avenir.
Ces contes, sont-ils de vieux contes revisités ou des contes que vous créez suivant les inspirations de votre imagination?
J’ai eu la chance d’avoir un père qui avait pour chaque chose, pour chaque problème un conte à raconter. Et je suis fan des conteurs. Donc chaque jour, je suis nourri par la parole conteuse.
Quels sont les thèmes les plus invoqués dans vos contes ?
L’Homme, son Animal et sa Conscience. Car l’homme dans sa vision mondiale est dit moderne puis dans ses traditions avec ses totems protecteurs, est animal familial…et malgré tout il affiche sa croyance au Créateur.
Qu’espérez-vous glaner quand vous participez à un festival de conte ?
Quand je vais dans un festival, au-delà de toute rencontre, je pars dans l’option d’aller donner en restant sur la définition, donner c’est donner. Et je n’attends rien en échange.
Aujourd’hui, vous avez publié chez quelques éditeurs et de belles illustrations accompagnent vos textes: comment choisissez-vous vos illustrateurs?
Très souvent, c’est hyper difficile de trouver des illustrateurs africains qui restent dans l’esprit et dans l’imaginaire africain. De par ce manque, on est souvent sur des rencontres avec des artistes d’autres continents. Mais l’avenir semble être plus éclairé. Et de plus en plus de maison d’édition proposent des rencontres intercontinentales.
Comment se passe alors la collaboration?
Comme avec les éditeurs, les illustrateurs et les patrons des festivals, souvent ce sont des rencontres de coeur à coeur.
Des contes en vue, des tournées malgré le confinement du moment?
Le confinement par définition de nos temps modernes, est un arrêt des consignes imposées par la vie de tous les jours et surtout par le regard des managers mondiaux. Donc pour un conteur comme moi, c’est le retour à la mémoire, à la réflexion et aux questionnements sur les choix de résilience du passé. Après 26 ans de travail artistique sans relâche, les agendas sont collés au mur. Il fut un temps où mon rythme de production chaque année était d’un spectacle ou d’une publication. Alors pour demain…inch’Alla !
Comment managez-vous vos tournées et votre vie familiale?
Par expérience, je maîtrise très souvent les choix des textes, l’agenda des répétitions, le spectacle à diffuser puis le reste vient à moi.
Parlez-nous de vos livres



Propos recueillis par Marie-Léontine Tsibinda Bilombo